En mémoire des victimes du naufrage du 22 avril 2021

Ce jour-là, 130 personnes perdent la vie dans un naufrage tragique. Amine, marin-sauveteur actuellement à bord, était sur l’Ocean Viking. Deux ans jour pour jour après le drame, il se souvient.

Amine était embarqué pour sa première mission avec SOS MEDITERRANEE en avril 2021, lorsque l’équipe, enchaînant la recherche de plusieurs embarcations en détresse très éloignées les unes des autres, est arrivée trop tard et impuissante, sur la scène d’un naufrage. Depuis, il a enchaîné les missions et les sauvetages, mais cette première confrontation directe avec ces morts en mer l’a profondément marqué.

Sur l’Ocean Viking, les regards de celles et de ceux qui y étaient se croisent. Amine raconte. « On a reçu un appel de détresse, et dès le départ, j’ai senti que ça n’allait pas le faire ! » L’Ocean Viking était engagé dans la recherche d’une autre embarcation signalée en détresse. Cette seconde alerte se situait à neuf heures de navigation et la météo se détériorait rapidement. « On a eu des vagues de sept mètres. Et c’était monstrueux de voir ça ! Même si nous étions dans un grand bateau de fer, on sentait la puissance des vagues. Alors comment 130 personnes entassées sur une petite embarcation pneumatique auraient-elles pu survivre » à une pareille tempête ?  

La voix hésite. « Lorsque nous sommes arrivé.e.s, on n’a trouvé qu’une épave. (…) Il y avait des cadavres partout. Tu sens l’odeur de la mort, c’est monstrueux. C’est vraiment monstrueux. Il y avait des bébés, il y avait des femmes voilées, il y avait des hommes. »  

Rien n’a changé 

Depuis, Amine garde cette certitude que si l’on n’a rien pu faire, au moins, « on a pu témoigner de ce qui s’était passé. » Et aujourd’hui, « cet acte de témoignage a honoré » la mémoire des victimes du naufrage du 22 avril 2021. 

Cette commémoration douloureuse, sur l’Ocean Viking comme à terre, est teintée de tristesse et de colère, car le droit de la mer continue d’être bafoué presque quotidiennement. Les vies perdues ce jour-là auraient pu être sauvées si la coordination des opérations de recherche et de sauvetage avait été efficace en Méditerranée centrale et si les eaux internationales n’avaient pas été vidées de moyens de sauvetage qui devraient y être consacrés par les États européens. 

Anthony Jean / SOS MEDITERRANEE