Relayer ce qui se passe en Méditerranée
10 février 2019

Sauver, protéger, témoigner : telles sont les trois missions portées par SOS MEDITERRANEE. Si en mer les marins-sauveteurs déploient tout leur savoir-faire et leur courage pour remplir les deux premières, à terre, ils sont des centaines à parcourir la France pour témoigner de la réalité en Méditerranée centrale, la route migratoire la plus mortelle au monde. Les chemins migratoires, la situation en Libye, les risques de noyades, le sauvetage en mer sont autant de thèmes étayés par des faits avérés et des témoignages. Mais si chacun suit la même trame d’intervention, les interprétations se construisent selon l’inspiration et les talents des bénévoles.

« Nous avons la religion des faits ».

« Nos interventions dans les collèges et les lycées sont chaque fois des moments forts », explique Alain. Journaliste, aujourd’hui à la retraite, il a rejoint SOS MEDITERRANEE pour intervenir dans les établissements scolaires. C’est son engagement.

« Nous avons la religion des faits. Certes il faut pouvoir répondre à toutes les questions mais chaque fois avec le souci de ne pas nous égarer, de rester sur la trame nationale. Nous expliquons d’abord le contexte qui a rendu nécessaire la réponse citoyenne de SOS MEDITERRANEE avec la multiplication des naufrages, l’absence de réponse des États ; nous évoquons les raisons des migrations : guerres, dictatures, pauvreté, bouleversements climatiques. Nous développons ensuite largement la partie opérationnelle, la façon dont nous procédons aux sauvetages. Notre job à tous, marins comme bénévoles à terre, c’est de contribuer à sauver des vies. La seule question que nous posons et sur laquelle nous demandons à tous de réfléchir est très simple : peut-on laisser les drames se multiplier en Méditerranée sans réagir ?»

Quatorze antennes de bénévoles qui rivalisent de créativité

Cette trame nationale ne contraint pas, elle guide. Chacune des quatorze antennes de SOS MEDITERRANEE la décline à sa façon. En Bretagne où les marins sauveteurs sont nombreux, les bénévoles ont introduit des jeux de rôle dans les interventions. Avec du ruban adhésif orange, couleur de l’Aquarius, ils délimitent au sol un espace d’un mètre-carré, invitent quatre, puis six, puis huit, puis dix élèves à y pénétrer afin de recréer progressivement la densité à bord des embarcations utilisées par les passeurs.

« La prise de conscience des conditions de navigation est immédiate quand on leur dit qu’il y a, parmi les naufragés, des jeunes de leur âge et qu’ils vont devoir passer des heures, parfois des jours entassés comme cela », explique Maël.

En Île de France, priorité est donnée à l’image. Celle qui parle d’emblée, qui raconte avec autant de précision qu’un long discours, celle qui fait réagir : le visage de ce naufragé éclairé de bonheur quand il pose le pied sur le pont du navire qui les a secourus, le sourire vite réprimé de cette femme qui a vécu le pire en Libye, le radeau surchargé qui arrive dans la brume… photos soigneusement sélectionnées par Sylvie parmi les milliers que contient la photothèque de SOS MEDITERRANEE. « Nous demandons aux élèves de les commenter, de les décrire, de dire ce qu’elles leur inspirent. Progressivement, au fil des échanges, nous racontons les drames, les sauvetages. Nos missions ».

Un livret pédagogique à l’usage des enseignants et des élèves

SOS MEDITERRANEE vient d’être agréée par le ministère de l’Education nationale comme association éducative complémentaire de l’enseignement public pour ses activités de sensibilisation menées en milieu scolaire. L’association a également produit un livret pédagogique à l’usage des élèves et des enseignants grâce au soutien financier de la Fondation Abbé Pierre.

Préfacé par Daniel Pennac et tiré dans un premier temps à dix mille exemplaires, le livret qui s’intitule sobrement « SOS – Sauvetages en Méditérranée », est distribué aux élèves qui le demandent après les interventions. Il est laissé dans les centres de documentation des établissements.

On y trouve notamment des témoignages de rescapés mais aussi de marins sauveteurs et la charte de SOS MEDITERRANEE. Les têtes de chapitre sont les questions qui reviennent très souvent dans les classes et pas seulement : l’existence de secours en mer est-elle une incitation à émigrer vers l’Europe ? Comment se déroulent les sauvetages ? Est-ce qu’il y a des gens malades ? Où doit-on conduire les rescapés ? Qui décide ? Pour venir en Europe, pourquoi ne pas prendre l’avion ?

« Ces questions, nous y répondons bien sûr quand elles nous sont posées par les élèves mais nous les consignons aussi » explique Martine, bénévole marseillaise. « Elles nourrissent notre réflexion sur nos interventions », poursuit-t-elle. « En réunion de formation des bénévoles, nous travaillons les réponses que nous leur apportons ».

Au-delà de l’école, témoigner en toute occasion 

Outre la sensibilisation en milieu scolaire les bénévoles de SOS MEDITERRANEE témoignent et sensibilisent dans des formats divers et à de multiples occasions. Prises de parole lors de festivals ou de concerts, lectures de témoignages, organisation d’expositions photos… ils ne manquent pas d’imagination et de créativité pour que la réalité de ce qui se passe en Méditerranée soit connue du plus grand nombre. En 2017 et 2018, les bénévoles de l’association sont intervenus dans pas moins de 700 évènements partout en France.

Vous souhaitez devenir bénévole ? Envoyez nous un email à contact@sosmediterranee.org pour plus d’informations.

CREDITS PHOTO : Mathieu Guingouain / SOS MEDITERRANEE